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Photo du rédacteurValérie Gillet

Paroles, paroles

Dernière mise à jour : 23 oct. 2021


Le pire défaut est selon moi l’incapacité à être présent.e et fiable. La qualité ultime étant la loyauté. Or, ce sont deux denrées rares, voire obsolètes. Et étrangères à certaines personnes que nous choisissons pourtant d’aimer. Fool me once, shame on you. Fool me twice shame on me ?


L’autre jour, ma psy (n’en sommes-nous pas tou.te.s là ?) m’a montré une photo en me demandant mon interprétation et mon ressenti de parent. On y voyait une enfant grimpant à une échelle, son père plaçant chaque barreau un à un d’une main en la tenant fermement de l’autre. Ma première réaction a été autocritique : je me retrouvais dans cette illustration, moi la mère hélicoptère qui trace la voie de ses enfants et les maintient à tout prix dans le droit chemin au lieu de leur laisser l’occasion de se construire un avenir et une personnalité.


Ma psy a posé sur moi un regard surpris. Ne voyais-je pas que ce papa extrayait chaque échelon de son propre corps, s’oubliant lui-même et sacrifiant des morceaux de lui dans sa mission parentale et la progression de son enfant ?


« Mais ce n’est pas du tout moi ! », me suis-je exclamée. « Je n’ai absolument pas l’impression de me sacrifier ! Si on voit les choses ainsi, autant ne pas faire d’enfants ! »


Depuis lors, je cogite. Ça me travaille, cette histoire de barreaux arrachés à mes propres côtes. Plus j’y réfléchis, plus l’évidence s'impose : ce n’est pas en tant que maman que je me comporte ainsi, mais en tant qu’être humain. J’ai toujours géré mes relations affectives au détriment de ma personne, comme un déchirement, un sacrifice.


Mon attachement et mon sens de la loyauté sont tels que je m’amoindris pour entretenir des liens que l’autre s’évertue à incendier dans des accès pyromanes chroniques. Je ferais tout pour que les gens continuent à m’aimer envers et contre tout, même s’ils se comportent comme des crétins finis et me trahissent à répétition.


C’est étrange, cette propension à attendre des autres une loyauté sans faille et une fiabilité totale et à être non seulement inévitablement déçue, mais à s’attacher à des gens qui sont incapables d’honorer les promesses qu’ils ne manquent pourtant jamais de faire. Pourquoi ne pas mettre un terme définitif à toutes ces relations nocives qui empoisonnent mon quotidien et entravent ma sérénité d’esprit ?


Nous avons un tel besoin d’amour et de reconnaissance que nous ferions n’importe quoi en échange de miettes d’affection. Nous espérons le meilleur des gens que nous aimons, même s’ils ne nous montrent que le pire. Lorsque l’on aime, tout est entrevu sous le prisme de ces satanés sentiments qui empêchent notre cerveau de fonctionner au mieux de ses capacités d’analyse.


Alors que faire ? Vivre en ermite ? Ne s’entourer que de personnes totalement loyales et fiables ? Vœu pieux : l’infaillibilité n’est pas de ce monde. L’être humain n’est ni loyal, ni fiable de nature, mais éminemment égoïste, traître et retors. La droiture n’est pas une qualité innée, elle s’acquiert au fil du temps, de l’éducation, des recalibrages successifs et des conséquences douloureuses des actes que l’on pose et dont on réalise qu’ils causent du tort à ceux que l’on aime lorsqu’on les voit souffrir.


Certaines personnes ne semblent pas avoir conscience du mal qu’elles font. Peut-être est-ce parce qu’au lieu de leur dire qu’elles blessent, nous pansons nos plaies en silence et retournons leur ouvrir notre cœur avec une candeur et une naïveté frôlant la bêtise profonde.


Quand on aime vraiment, on ne se protège pas.


Car on ne devrait pas avoir à le faire.

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